TITRE : Scarifications suite de Paroles avec l'au-delà.
AUTEUR : June87
FEEDBACK : june87@caramail.com
SPOILERS : Saison 7.
RATING : PG-13
DISCLAIMER : Faith, Buffy et tous les autres personnages appartiennent à Joss Whedon, WB, etc.
RESUME : Après la nuit qu'ils viennent de passer, les blessures extérieures et surtout intérieures de chacun sont ravivées. Et entre Faith qui va manifestement très mal, et les révélations d'Holden à propos de Spike, Buffy tente de faire face… plus ou moins.
NOTE : Je change un peu les amis de Dawn : Carlos est toujours un hispanique, mais Kit est blonde aux yeux gris, coiffure un peu genre Cloé dans "Smallville", et caractère excentrique et déluré. Et je profite de cette fic, qui me ressemble davantage que les précédentes, pour passer mes remerciements. Donc, merci à Eygon et Timinou pour me soutenir et me faire leurs critiques constructives, et merci à Plioute, Nefertari, Lazizaneuse et Elegy (j'en oublie sûrement, sorry!) pour leur marques de soutien et leurs compliments.

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PARTIE 1

Hôpital de Sunnydale. Nuit.

Vue sur l'entrée de l'hôpital. On voit Buffy, portant Faith, toujours inerte, passer devant le panneau 'Emergency', et entrer dans l'hôpital.

Sous-sol. Nuit.

Spike fredonne une chanson, creusant le sol en terre battue. Puis il s'arrête, se frotte les mains et baisse les yeux. Sur le sol, on voit la jeune fille blonde qu'il a tuée dans l'épisode précédent. Il la saisit et la jette sans pitié dans le trou qu'il a creusé. Il la recouvre de terre, en continuant à fredonner.

Un appartement en Angleterre. Jour.

Un homme d'environ 50 ans rentre chez lui, absorbé par ses pensées. Quand il lève les yeux, il se rend compte que l'endroit est ravagé.

Homme (appelant): "Mira ? Mira ?"

Il cherche dans les pièces et aperçoit enfin une adolescente couchée sur le sol, apparemment égorgée. L'homme est pétrifié pendant un instant, mais une silhouette, vêtue de noir, une capuche couvrant son visage, l'attaque, essayant de la poignarder. L'homme réagit rapidement et évite le coup. Il tente de saisir une arme accrochée au mur, mais la silhouette l'attaque par derrière, et l'homme s'effondre sur le sol, près de l'adolescente.

Maison des Summers. Jour.

Willow entre par la porte d'entrée.

Willow (appelant): "Dawn ? Buffy ?"

Brusquement elle s'arrête, réalisant l'état chaotique de la maison.

Willow: "Oh mon dieu… Dawn ? Daw…"

Elle aperçoit Dawn au milieu du salon, assise, les yeux dans le vague. Willow se précipite vers elle et s'accroupit à sa hauteur.

Willow (doucement): "Dawnie ? Dawnie, réponds-moi, qu'est-ce qui s'est passé ici ?"

Dawn (fixant le vide): "Il voulait m'empêcher de lui parler, mais je l'ai vaincu."

Willow (fronçant les sourcils): "De quoi tu parles, Dawn ? Où est Buffy ?"

Dawn (revenant progressivement sur terre): "Buffy ? Elle… elle n'est pas là… je suis toute seule… depuis longtemps."

Willow: "Ok, je… je suis désolée, j'aurais dû être là… [Voyant son pied bandé] Tu es blessée ?"

Dawn: "C'est rien, juste une coupure, quand le four a explosé…"

Willow: "Viens [Elle l'asseoit sur le canapé] Raconte-moi ce qui s'est passé ici."

Dawn: "Il… il y avait ce bruit [Elle semble perdue] et… comme des coups tu vois… et puis la télé ne voulait pas s'éteindre, je l'ai fracassée avec la hache… et le micro-ondes… explosé… ensuite la radio… [Elle commence à pleurer] c'était sa voix, Willow, c'était vraiment sa voix !"

Willow: "De qui est-ce que tu… ?"

Dawn: "Maman."

Willow: "Oh, non, Dawn !"

Dawn: "Elle était là… sur le canapé… elle voulait me parler… mais… mais cette chose… ça l'en empêchait ! J'ai… j'ai récité une formule, ça m'a mutilé, mais je l'ai fait quand même… et tout s'est arrêté, tout a disparu et… elle était là ! Brillante et si belle, et elle m'a parlé… maman… elle a… [Elle sanglote] et puis plus rien…"

Willow: "Oh, ma chérie ! Mais… Dawn, écoute-moi, je ne crois pas que c'était elle."

Dawn: "Quoi ? Mais…"

Willow: "Je… je ne le pense pas… cette nuit, j'ai… j'ai vu… Tara. Mais, ce n'était pas elle, Dawn, c'était autre chose… de mauvais."

Dawn: "Tara ? Oh, je… je suis désolée Willow… mais… mais maman n'a rien dit de mal, juste que quelque chose était en chemin et… rien de mal."

Willow: "Je ne sais pas Dawn, il ne faut juste pas trop y penser, parce que ce n'était peut-être pas elle."

Dawn: "Mais la chose mauvaise… c'est peut-être ce qui m'empêchait de voir maman, parce qu'elle voulait me prévenir… ou… ou non."

Dawn se remit à pleurer dans les bras de Willow.

Appartement d'Alex. Jour.

Alex est accoudé au comptoir et boit un café. Spike entre.

Alex: "Hey, Spike !"

Spike (signe de tête vague): "Harris."

Alex: "Bonne nuit ?"

Spike: "Ouais, j'ai… heu, rencontré une fille, on a parlé et… hum… raccompagné chez elle et… voilà."

Alex: "Bien… et ? Il est 7h du mat Spike !!"

Spike: "Je… je ne me souviens plus vraiment… j'ai dû traîner…"

Alex: "Tu es sûr que tout roule ? Tu as l'air… brumeux."

Spike: "Va te faire foutre, Harris ! Je plane, ok ?"

Alex: "Tu quoi ? Un vampire peut faire ça ?"

Spike: "C'est une expression ! Non mais c'est pas vrai, quel crétin !"

Alex: "Ouais, bon, je pars bosser, à ce soir…"

Spike: "C'est ça."

Une main sur la poignée de la porte, Alex se retourne.

Alex: "Attends une seconde… il fait jour dehors ! Comment est-ce que tu… ?"

Spike: "Cave."

Alex: "Hein ?"

Spike: "La cave ! Tous les immeubles en ont une ! Je… j'ai dû m'y assoupir ou… laisse tomber, aucune importance."

Alex: "Mais qu'est-ce que tu faisais dans… ? [Il s'interrompt en voyant l'heure] Ok, là j'ai un rendez-vous vraiment important, mais on en reparle ce soir c'est clair ?"

Spike élude d'un geste de la main. Alex soupire et sort. Spike reste immobile un moment, plongé dans ses pensées, puis se secoue, entre dans sa chambre et pousse la porte derrière lui.

Maison de Buffy. Jour.

Buffy pénétra chez elle, et alla s'asseoir sur le canapé du salon. Elle avait l'air sombre et lointain et elle gardait les yeux baissés, ne voyant même pas l'état chaotique du salon. Willow dévala l'escalier en l'appelant, mais Buffy ne sembla pas l'entendre.

Ma faute. Ma faute. Sang. Ma faute. Partie. Ma faute !

Willow: "Buffy ?"

Elle s'assit sur l'accoudoir du canapé, auprès de Buffy, comprenant à sa mine que quelque chose de mauvais s'était passé pour elle aussi. Willow passa sa main sur les cheveux de Buffy, d'un geste rassurant. Buffy leva doucement les yeux vers son amie, reprenant conscience des choses.

Willow (doucement): "Buffy ? Qu'est-ce qu'il y a? Parle-moi."

Buffy (d'un air désemparé): "Faith… à l'hôpital… c'est… [Elle se mit à pleurer] je, je… désolée… je n'ai pas pleuré pendant tout ce temps à son chevet… mais là ça… ça retombe tout à coup…"

Willow (prenant Buffy dans ses bras): "Pleure… pleure ça fait du bien… [Buffy sanglota un moment contre Willow, puis se calma un peu] Bien, maintenant essaie de me raconter, je suis là d'accord, c'est… c'est grave pour Faith ?"

Buffy: "Elle… un coup de poignard dans le ventre… elle a perdu beaucoup de sang… ce n'est pas… pas normal, c'est… comme brûlé de l'intérieur tu vois… Et elle… mon dieu Will si tu avais vu son regard ! Elle est partie, c'est… c'est… c'est ma faute !"

Buffy laissa s'échapper un sanglot en faisant cette dernière révélation qui l'obsédait, elle se délivrait d'un poids, et avec l'oppression qui la quittait, seule restait la douleur. Horrible, glaciale, partout, tout autour, l'enveloppant, s'insinuant en elle, l'empêchant de penser… Cette nuit, la nuit dernière semblait un cauchemar, elle en revoyait des bribes… Les néons le long des couloirs des urgences, distillant leur lumière froide et blanche… L'odeur des hôpitaux, aseptisée… Le regard vide de Faith… L'infirmière épongeant le sang sur le sol, dans sa blouse blanche immaculée… Le bal incessant des médecins, disparaissant derrière les portes où la vie de Faith se jouait… Et elle-même, là, posée sur un fauteuil, vidée brusquement, sans avoir le besoin de se montrer forte, sans larmes, anesthésiée par le choc, sans pensée rationnelle, avec l'angoisse sourde du «désolé, nous n'avons pas pu la sauver». Des heures elle avait dû rester ainsi, dans la même position, blême, les yeux écarquillés d'incompréhension… Comment les choses en étaient arrivées là ? Comment se trouvait-elle à attendre, comme le glas de sa propre mort, que celle qu'elle aurait voulu voir en enfer un mois plus tôt s'en sorte ? Comment Faith, cette Tueuse qui savait toujours tout prévoir, qui savait toujours comment lutter, se retrouvait brusquement sur un lit d'hôpital ? Sa faute. Buffy, derrière ses prières silencieuses pour que Faith ne meurt pas, pour qu'elle ne la laisse pas, alors que tout allait enfin s'arranger et qu'elles allaient juste être heureuses et vivre, pour qu'elle revienne du monde d'horreur où son esprit semblait s'être arrêté, Buffy avait cette phrase lancinante qui la torturait. Sa faute. Avant l'hôpital, Gloria, Angel, Holden… tout ça lui paraissait loin, si loin et irréel… Seul restait ce qu'ils lui avaient dit : «Est-ce que c'est une raison pour la tuer ?», «tu voulais qu'elle disparaisse […] parce que c'était trop dur pour toi», «tu es dangereuse pour tes proches», «tu les tueras tous», «d'enfoncer ce couteau en elle». Sa faute. Confusément, Buffy en était persuadée, c'était elle, quelque chose lui avait montré, elle était responsable. Rien que sa faute. Du fond de la brume de son esprit elle tentait d'extraire des souvenirs, mais rien, elle ne se rappelait pas lui avoir fait du mal. Jamais de mal, plus jamais de mal. Mais pourtant, c'était sa faute.

Willow secoua fermement, mais gentiment, Buffy.

Willow: "Buffy, arrête, arrête ça tout de suite, te laisser aller dans la douleur ne l'aidera pas. Te culpabiliser non plus.

Buffy: "Ils me l'ont montré, Will, ils savaient que je l'avais fait… que c'était moi."

Willow: "De quoi tu parles ? Toi qui quoi ?"

Buffy: "Mais… moi qui ai enfoncé le poignard ! Ils savaient."

Willow (interloquée): "…quoi ? Tu… tu… toi, tu as fait ça à… mais… non ! Pourquoi ?"

Buffy (criant et pleurant): "Je n'en sais rien, je ne me rappelle même pas l'avoir fait !"

Willow (perdue): "Alors… comment sais-tu que c'est toi ? Est-ce que c'est Faith qui… ?"

Buffy: "Non, voyons ! Angel… Angel et Glory… ils m'ont montré qu'elle se ferait poignarder avant même que je la retrouve dans la crypte !"

Willow (fronçant les sourcils sans comprendre) : "Angel ? Glory ? Mais qu'est-ce que tu rac… [Réalisant brusquement] Ce n'est pas vrai… alors, toi aussi, hein ? Buffy ? Regarde-moi, ce… ce n'était pas eux, c'était autre chose, le grand mal, ce qu'on attendait, ce qui dévore tout, ou pire."

Buffy (reprenant progressivement conscience, ses sens de Tueuse se réveillant): "…le… le grand mal… Willow… [Relevant brusquement la tête] Pire ? Comment ça pire ?"

Willow (prenant une inspiration): "Cette nuit… j'ai vu Tara, elle m'a parlé, elle… elle a dit des choses… belles au début et… elle tu vois, mais… ça ne l'était pas, c'était mauvais et ça avait son apparence et son attitude, mais c'était mauvais. Elle a dit… tu sais «venu d'en dessous ça dévore tout», elle a dit que ce n'était pas elle, elle est plus… l'investigatrice tu vois, elle est… je sais pas Buffy… je me rappelle… «J'ai fini le cercle mortel»… je… je ne sais pas encore ce que ça signifie, mais c'est puissant, Buffy, plus puissant que ce que je n'ai jamais pu rencontrer."

Buffy: "Mon dieu… mais, pourquoi ? Pourquoi faire tout ça ? S'en prendre à moi, à toi… à Faith sûrement, et à… [Elle réalise soudain l'état de la pièce] Dawn… Willow ? Oh, non, Dawn ? Où… ? Qu'est-ce… ?

Willow: "Ca va, ça va… calme-toi Buffy, tout va bien, elle va bien… elle est dans sa chambre.

Buffy (redoutant la réponse): "Qu'est-ce qui s'est passé ? Qu'est ce que CA lui a fait ?"

Willow: "Apparemment… elle… il, il y avait une menace, une force qu'elle a combattu… Elle s'est montrée très courageuse… et ça lui a donné le droit de voir… [Suspendant sa phrase]"

Buffy: "De voir quoi ? Willow ?"

Willow: "De… de voir… votre mère."

Buffy (ses yeux s'agrandissent de stupeur): "Non… Dawn… elle… elle était toute seule… elle a dû avoir peur, et mal… je n'étais pas là…"

Willow: "Je pense que CA savait que tu ne serais pas là, que CA aurait attendu que tu partes, n'importe quand. Tu n'y pouvais rien Buffy. Elle survivra. Elle est forte."

Buffy: "Est-ce que… est-ce que tu penses qu'il y ait une chance pour que ça ait réellement été maman ?"

Willow: "Je ne sais pas… mais c'était différent de ce qu'on a vu apparemment… ça ne lui a pas dit ou fait de mal… il y a une petite chance que ça ait été elle, Buffy, mais nous devons prendre les choses avec précaution. Nous ne pouvons avoir confiance en rien pour l'instant."

Buffy hocha la tête, fatiguée.

Buffy: "Et toi ? Est-ce que ça va ? Tu… tu as l'air de prendre tout en main, de panser nos plaies, mais… tu… tu es sûre que ça va ?"

Willow (avec un petit sourire triste): "Non. J'ai vu Tara. C'est comme une plaie ouverte sur mon cœur, mais j'ai l'habitude maintenant… mon cœur est scarifié, j'apprends à y survivre. Si je veux réussir il faut que je fasse quelque chose, et vous aider à soigner vos blessures semble un bon plan."

Buffy (avec un sourire de compréhension peiné et reconnaissant): "Merci Will."

Silence.

C'est bon de t'avoir près de moi Buffy, au milieu de toute cette souffrance et de tout ce chaos, c'est bon que tu sois là, même sans rien dire. J'ai besoin de ça. D'une amie. De toi. C'est rare ces temps-ci, le silence, le vrai soutien, le partage… On a tous nos blessures et on tente de tenir. Et ce qui se prépare va être encore plus dur…

Buffy: "Bon, je… je monte voir Dawn."

Elle posa sa main sur l'épaule de son amie. Ce geste banal était chargé d'émotions, émotions que les paroles étaient impropres à rendre, et les deux jeunes femmes se sourirent, partageant bien plus qu'une amitié en ce moment précis, partageant les même sentiments, partageant cette vie de lutte contre le mal, de lutte avec le mal. Buffy se rendit compte, tout à coup, comme elle était injuste, parfois, de se sentir seule et incomprise. C'était faux. Ces amis étaient là, et même plus, ils avaient choisi d'être là, pour elle. Il y a sept ans si une petite rousse avait dit «désolée mais je ne veux pas aider la Tueuse», sans doute n'aurait-elle pas souffert autant, alors comment lui reprocher de ne pas savoir ce qu'est une Tueuse, alors qu'elle avait sacrifié sa vie pour elle. Et Buffy sentit son cœur se réchauffer, elle n'était pas responsable de Willow, elles étaient responsables l'une de l'autre. Touchée et soudain réconfortée par cette constatation qu'elle avait mis tant d'années à faire, Buffy accentua la pression sur l'épaule de Willow. La jeune sorcière lut dans son regard que la blonde avait enfin compris, et un peu de son immense souffrance la quitta, oui, un peu, si peu, mais c'était déjà tant…

Buffy se détacha alors doucement de son amie, elle avait compris ce qui se passait en elle, comme si une nouvelle connexion avait eu lieu, et elle monta rejoindre sa sœur.

Hôpital de Sunnydale. Soins intensifs.

Les sons paraissaient lointains, les voix. Cotonneux. Brumeux. Faith plissa les yeux, empêchant la lumière de s'infiltrer sous ses paupières. Lumière blanche, vive, douloureuse. Les sons se faisaient plus précis. Bip, bip, bip. Une porte qu'on ferme. Un chariot qui passe. Elle refusait de tout son être de revenir, elle ne voulait pas laisser à nouveau entrer le mal.

Petit à petit son corps se faisait plus présent. Elle pouvait bouger ses mains, ses jambes. Elle cligna des yeux. Trop clair. Progressivement, elle s'habitua à la luminosité. Hôpital. Blanc.

C'est comme la dernière fois. Je hais les hôpitaux…

Tentative de rassembler ses souvenirs. Comme un puzzle qu'on reforme, mais avec plus de pièces, et d'émotions. Pas juste les images, malheureusement. Détachée. Faux. La crypte et… ce fut comme un souffle qui l'atteignit de plein fouet, la capitaine, le maire et… Elle ferma les yeux, emportée par la souffrance, l'horreur, la peur… Buffy, le visage de Buffy, ses yeux… Point d'appui, bouée de sauvetage, s'y raccrocher avant tout, ne pas se laisser noyer. Horrible. Elle se revoyait, allongée sur le sarcophage, quand la chose noire lui avait entré son poignard rouge incandescent dans l'abdomen. Elle n'avait rien ressenti. Pas de mal. Rien. Rien en comparaison de la douleur qui étreignait son cœur, le broyant, le retournant, l'émiettant. Lacéré. Entaillé. Tout s'était rouvert, comme avant, avant Faith, avant la Tueuse. Si profond, si vif… impossible de crier, de pleurer. Alors elle était partie, loin, ailleurs, dans une caravane, dans une cuisine, devant… Elle y était encore. Pour toujours. Pas de retour. Pas de rédemption. Meurtrière. Folle.

Sortir, s'en aller, elle devait partir d'ici, retrouver… Sa blessure la cloua sur place, lancinante. Elle retomba sur son oreiller. Besoin de...

«Buffy?»

Elle avait voulu crier, mais seule une voix faible et rauque s'était échappée de sa gorge. Elle plissa les yeux, désemparée.

…: "Quel horrible endroit, n'est-ce pas ? Je déteste te voir ici, comme la dernière fois… et toujours à cause d'elle !"

Elle tourna la tête. Le Maire, à sa droite. Souriant.

Faith: "Partez ! Foutez le camp !"

Elle se voulait ferme, directive, on aurait dit une enfant sur le point de pleurer.

Wilkins: "Oh, Faith ! Pourquoi tu prends toujours les choses ainsi ? Je te fais remarquer que je suis à tes côtés… le seul à tes côtés, apparemment !"

Non. Il avait tort. Il mentait. Les autres allaient venir, peut-être étaient-ils dans le couloir ou…

Faith: "Laissez-moi… je… je n'ai pas besoin…"

Wilkins: "D'un père ? Bien sûr que si ma Faith. Surtout maintenant, maintenant qu'elle t'a trahie… Qu'elle t'a encore poignardée… cette sale Tueuse !"

Faith (perdue): "Qu… ? Non ! C'est… c'était un… une sorte de… en noir…"

Wilkins: "Oh, bien sûr, je comprends, tu préfères refouler, te raconter des histoires… pour diminuer la souffrance de la trahison..."

Faith: "Non ! Ca n'a rien… pourquoi vous faites ça ?"

Wilkins: "Eh bien… pour te protéger ! Pour te protéger d'elle ! Tous les pères font ça !"

Faith: "Vous n'êtes pas mon père ! Vous n'êtes rien !"

Wilkins (riant): "Tu es incroyable, tout de même ! Enfin, comme tu veux… Bon, alors, il faut y aller maintenant, Faith."

Faith: "Qu… quoi ? Où ?"

Wilkins: "A cause de Buffy, tu as bien pris la décision de partir, non ? Après ce qu'elle t'a…"

Faith: "Stop ! Vous n'y arriverez pas. Je ne sais pas ce que vous essayez de faire, mais vous n'y arriverez pas."

Wilkins: "Puisque je te dis de partir !"

Faith le fixa, incrédule, il venait de s'énerver. Le Maire ne s'énervait jamais. Etrange ou… son point faible. Elle allait répliquer, quand il disparut dans une petite lumière. Elle comprit pourquoi quand, tout de suite après, la porte de sa chambre s'ouvrit et qu'une infirmière entra.

Infirmière: "Mais vous êtes réveillée ! Vous auriez dû sonner !"

Trop occupée avec un spectre, désolée.

Infirmière: "Alors, comment vous sentez-vous ?"

Faith: "Le pied ! [Elle grimaça de douleur]"

L'infirmière la regarda avec commisération.

Infirmière: "Vous voulez plus de morphine ?"

Faith: "Morphine ? [Elle regarda le compte-gouttes fixé à son bras] Bonne idée."

Histoire de se retrouver à nouveau dans le coton, anesthésier la souffrance, faire taire les voix… tant pis si ça diminuait ses facultés de Tueuse. Un paquet de morphine, oui, c'était ce qu'il lui fallait.

Infirmière (rajoutant de la morphine dans le compte-gouttes): "Le médecin ne va pas tarder, il va vous examiner. Pas jolie votre blessure, il parait !"

La ferme !

Faith: "Ouais, il parait."

Infirmière: "Comment est-ce arrivé ?"

Oh, tout simple, je suis la Tueuse, vous savez, celle qui bute les vampires et démons en tous genre…

Faith: "Règlement de compte."

Avec le passé et avec l'enfer.

Infirmière: "Oh… et vous… ?"

Faith (la coupant): "Visites. Est-ce que j'en ai eu ?"

Infirmière: "Heu… non, désolée."

Faith baissa la tête. Un coup de plus. Au point où elle en était…

Infirmière: "Mais… attendez, oui, il y a cette fille… blonde, celle qui vous a amené, elle est restée toute la nuit pour savoir si vous alliez vous en sortir."

Faith (bas, pour elle-même): "Buffy."

Soulagement. Réconfort. Non, pas vraiment en fait. Trop de mal. Indifférence. Détachement à tout, en fin de compte. Ses yeux, ils devaient être vides, comme avant. Pas grave. Pas important. Plus de chance d'être sauvée de toute façons.

A ce moment-là, le médecin entra dans sa chambre, lui adressant un de ces sourires convenus que Faith détestait. L'infirmière parla à voix basse au médecin, puis sortit en le regardant d'un air béat et surjoué. Une stagiaire, sûrement.

Médecin (à Faith): "Alors, vous êtes revenue parmi nous ? Comment vous sentez-vous ?"

Si une seule autre personne me pose la question, je fais paraître un encart dans le journal !

Faith: "Comme quelqu'un à qui on a enfoncé un poignard dans le ventre."

Le médecin la fixa, décontenancé, sans doute aurait-elle dû répondre quelque chose dans le style «ça fait un peu mal, mais ça va docteur». Faux, ça n'allait pas. Et il l'emmerdait le doc. Il l'ausculta pendant quelques minutes.

Médecin: "Bon, maintenant nous allons regarder votre vilaine blessure."

Moi c'est ta vilaine tronche que j'aimerais voir disparaître…

Le médecin souleva l'espèce de chemise de nuit en plastique vert dont Faith avait été affublée. Il passa un doigt sur sa cicatrice. Pas celle pourquoi elle était là, non l'autre, du côté gauche.

Médecin: "Pas joli ça… qu'est-ce qui vous est arrivé ?"

Faith: "Appendicite."

Il la regarda, incrédule, mais n'osa répliquer devant le regard noir que Faith lui lança. Il était curieux de voir comme son corps, à l'image de son esprit, refusait de faire disparaître cette scarification. Buffy. Trahison. Douleur. Un cercle sans fin. Elle avait pardonné, pourtant. Elle avait bien d'autres démons à affronter… Le médecin souleva son pansement et eut l'air stupéfait. Faith non. Il n'avait sans doute pas dû soigner beaucoup de Tueuses dans sa vie… Mais contre toute attente, il déclara:

Médecin: "Eh bien, vous on peut dire que vous ne cicatrisez pas vite !"

Faith lui jeta un œil incrédule, et se redressa sur ses coudes pour voir sa blessure. On aurait dit qu'elle venait juste d'être recousue. Du sang s'en échappait encore. Le médecin la força à s'allonger de nouveau.

Médecin: "Vous allez la rouvrir, ne bougez pas !... Bon, c'est étrange, mais pas si grave… vous allez juste devoir passer un peu plus de temps que prévu avec nous…"

Va te faire foutre ! Tu m'appelleras quand tu t'y connaîtras en surnaturel !

Médecin: "Mais, votre blessure était vraiment… enfin je n'ai jamais rien vu de tel, on aurait dit que les chairs avaient été brûlées de l'intérieur… Comment c'est arrivé au juste ?"

Faith: "Mauvais endroit, mauvais moment. Règlement de compte d'un gang quelconque."

Médecin: "D'un gang ? A Sunnydale ?"

Faith: "Bouche de l'enfer mon vieux !"

Médecin: "Pardon ?"

Faith: "Laissez tomber."

Médecin: "Non, je… vous êtes sûre de vous sentir bien ? Vous voulez que je demande à un psychologue de passer vous voir ?"

Et c'est reparti ! On se croirait en taule ! «Vous devez me parler Faith», «oui, doc… je suis folle et je veux devenir Donald Duck… ça vous va ?»

Faith: "Ouais, c'est ça, faites donc…"

Je me serais tirée de toute manière.

Le médecin lui fit encore quelques recommandations d'usage, avec un ton docte et plat, du genre à vous endormir, ou à vous achever… puis il sortit. Faith soupira de soulagement. Elle fit tomber ses draps et arracha sa perfusion. Elle arriva ensuite tant bien que mal à s'asseoir sur le bord de son lit. Elle grimaça de douleur, appuyant sur son pansement pour éviter que la blessure ne se rouvre. Avisant ses fringues sur un fauteuil, elle se mit debout, vacilla, se rattrapa au bord du lit, jura de dépit, et finit par atteindre ses vêtements.

Son débardeur était rouge de sang, tout le monde le remarquerait. Elle le déchira, de manière à ce qu'il lui arrive juste sous sa poitrine, on penserait que ce n'était qu'un petit haut sexy. Faith s'habilla, le pire fut de fermer son pantalon, qui compressa sa blessure. Puis elle mit la main sur son pansement, de manière à le dissimuler, et sortit dans le couloir.

Les murs, le sol, la lumière, tout paraissait vert, même les patients, dans leurs chemises de nuit plastifiées. Cauchemardesque. Faith avança, se tenant au mur de sa main droite. Mal. Elle n'avait jamais eu si mal, jamais aussi longtemps en tout cas. Niveau douleur il y avait eu pire. Buffy. Se faire poignarder par la personne en qui vous placez le plus d'espoir était pire. Lame glacée contre lame brûlante. Fer blanc contre fer rouge. Trahison contre néant. Buffy. Elle devait la rejoindre. Ses sens de Tueuse lui ordonnaient, même si son cœur de femme lui disait de fuir, d'écouter le maire, et pourquoi pas de mettre fin à la souffrance qui ravageait son cœur ? Non. Mission. Avancer. Il fallait continuer à avancer.

Faith aperçut un médecin et se planqua dans une chambre le temps qu'il passe. Elle devait aller plus vite, ils allaient se rendre compte de sa disparition. Elle accéléra.

Chambre de Dawn Summers.

Dawn regardait par la fenêtre. Le temps se couvrait. Elle frissonna.

«Je t'aime, et j'aime Buffy».

Elle ne cessait d'entendre sa mère. Elle ne devait pas y penser, si ça se trouve ce n'était même pas elle.

«Je t'aime Dawn».

Elle ne pouvait pas s'empêcher de croire que si. La nuit qu'elle venait de passer lui semblait avoir été un grand cataclysme. Long. Pénible. Mais elle s'était battue, et elle avait gagné.

Tu serais fière, maman.

Buffy était passée tout à l'heure, Dawn l'avait rassurée, sa soeur la considérait trop comme une enfant, elle avait mûri pourtant, elle était assez forte pour se battre. Elle avait cette puissance en elle, cette puissance de clé. Et elle n'avait rien de démoniaque. Dawn s'assit sur son lit et soupira. Maintenant elle s'inquiétait pour Faith, et pour Buffy qui avait eu l'air mal et perdu…

«Quelque chose est en chemin.» avait dit Joyce.

Oui, en chemin, et Dawn pressentait dans sa chair que c'était quelque chose de grand et de mauvais, quelque chose de puissant, de surpuissant. Et elle s'y sentait liée. Forgée par le mal elle devait y être un peu connectée.

Quelle horreur, je ne suis pas comme ça !

Mais elle se sentait plus forte, plus sûre au fur et à mesure que CA approchait. Dawn aurait voulu descendre rejoindre le Scooby, mais elle ne s'y sentait pas totalement à sa place, ils étaient plus vieux, et ils partageaient des choses qu'elle avait parfois du mal à suivre. Elle se sentait seule, souvent. Dawn aperçut le téléphone sans fil sur sa table de nuit. Elle sourit. Elle s'en saisit et composa un numéro.

Dawn (au tél): "Susanna ? […] Non, je n'ai pas pu venir au lycée… dure nuit. […] C'est vrai ? Et Kit est là aussi ? […] Heu, je vous expliquerai… mais c'est… enfin, surnaturel, tu vois ? […] Oh, ok, alors venez à la maison ! […] Hum hum, d'accord, à tout de suite alors… bises."

Dawn raccrocha avec un sourire satisfait, elle aimait bien son petit groupe, et depuis l'histoire de la capitaine cheerleaders Susanna s'était jointe à eux, et ils étaient encore plus forts et unis. Peut-être formeraient-ils leurs propre gang un jour…

Ouais, le Dawning Gang… cool !

Suite PARTIE 2